Les tendances macroéconomiques…Se remettre d'une année 2020 cahoteuse
La pandémie de la COVID-19 a eu de profonds effets socio-économiques négatifs à l'échelle mondiale. Elle a perturbé les chaînes d'approvisionnement, les soci...
La pandémie de la COVID-19 a eu de profonds effets socio-économiques négatifs à l'échelle mondiale. Elle a perturbé les chaînes d'approvisionnement, les sociétés et les moyens de subsistance, avec des pertes humaines considérables. La simultanéité du choc de l’offre (dû à l’arrêt de la production dans plusieurs secteurs) et de la demande (dû à la baisse des revenus à cause du chômage), est l’une des grandes particularités de cette crise.
Le Sénégal a évité la récession en 2020
Le Sénégal a enregistré son premier cas de la COVID-19 en mars 2020. La pandémie a eu un impact négatif sur une période de croissance forte et a aggravé des vulnérabilités préexistantes. Avant la pandémie, le Sénégal a connu des taux de croissance économique élevés qui ont atteint en moyenne 6% entre 2014 et 2019, grâce à la mise en œuvre du Plan Sénégal Émergent (PSE), sur cette période.
Le premier plan quinquennal du PSE a soutenu l'expansion des secteurs primaire et tertiaire et a permis d’attirer un volume assez important d’investissements étrangers dans le pays.
Cependant, la pandémie a incité le Gouvernement à réorienter une partie conséquente de ses ressources budgétaires, et à se concentrer sur le contrôle de la propagation du virus dans le pays et sur l’atténuation des effets économiques et sociaux. Ainsi, on peut noter l'introduction de mesures telles que le couvre-feu et la fermeture des frontières pour limiter les grands rassemblements et la propagation de la COVID-19 pendant la première vague. Ces mesures ont impacté négativement la consommation intérieure, qui représente 68% du PIB (DPEE). La demande intérieure quant à elle, s’est établie à -4,6% en 2020 contre +4,2% en 2019 (DPEE, 2021). En outre, la pandémie a déclenché un ralentissement du commerce international et des envois de fonds des migrants.
Cependant, le Gouvernement a élaboré et mis en œuvre un Plan de résilience économique et sociale (PRES) pour soutenir une économie en ralentissement et des segments vulnérables de la population. Un fond de 1000 milliards de francs CFA a été mis en place par l’État. De plus, le deuxième Plan d’Actions Prioritaires (PAP 2019-2023) a fait l’objet d’une révision et est devenu le PAP Ajusté et Accéléré (PAP2A) pour 2020-2023. Ce plan de relance est stratégiquement orienté vers des objectifs de développement endogène afin de booster la résilience économique.
L’évolution du PIB ainsi que de ses composantes en glissement annuel est représentée par les graphiques ci-dessous :
Par rapport à la même période de l’année 2019, le PIB réel du quatrième trimestre 2020 a connu une croissance de 2,9%. En conséquence, la croissance du PIB réel pour l'année 2020 était de 1,9% contre 4,4% en 2019 et était due à une forte performance du secteur primaire qui a augmenté de 11,6% en 2020, contre 4,5% en 2019 et a contribué à +1,7 points de pourcentage. Malgré le ralentissement, le Sénégal a évité une récession l'année dernière contrairement à de nombreux pays. Le PIB de l'Afrique s'est contracté de 2,1% en 2020, entrainant ainsi sa première récession en 25 ans.
Alors que la reprise économique est en cours au Sénégal, certains risques persistent. Une pandémie prolongée pourrait ralentir le rythme de la reprise. C'est particulièrement le cas pour les secteurs de l'exportation et du tourisme, qui sont corrélés à la reprise économique des principaux partenaires commerciaux du Sénégal. Une faible reprise mondiale affaiblirait également les flux d'investissements directs étrangers au Sénégal, ainsi que les envois de fonds des migrants. Une hausse soutenue des prix des produits de base entraverait également la croissance et augmenterait les coûts d'importation d'énergie. Par conséquent, ceux-ci ont poussé le Fond Monétaire International (FMI) à réviser ses prévisions de croissance pour 2021 à 3,7% contre 5,2% annoncées en janvier 2021.
Le rythme de la reprise économique est également lié à une réduction soutenue du nombre de cas de COVID-19 et à une campagne de vaccination réussie. Cela permettrait une relance complète de tous les secteurs économiques, y compris l'industrie du divertissement qui a été largement impactée par les restrictions sur les grands rassemblements.
Les finances publiques : renforcement de la consolidation fiscale
Le Gouvernement du Sénégal a envisagé une reprise de la consolidation fiscale cette année à la suite de l'augmentation des dépenses publiques d'urgence de l'année dernière, afin de répondre à la pandémie. Les recettes fiscales ont également été plus faibles en 2020 à cause de la baisse de l'activité économique intérieure et des recettes d'exportation en raison de la pandémie. Le déficit budgétaire de 6,1% du PIB en 2020 devrait se réduire à partir de 2021 pour atteindre le plafond communautaire de 3,0% en 2023.
Toutefois, la consolidation fiscale devrait être plus lente cette année. Cela serait dû aux dépenses plus élevées associées à l'achat de vaccins contre la COVID-19, à un programme visant à stimuler l'emploi des jeunes, ainsi qu'à une croissance économique plus lente que prévu. En effet, une croissance économique plus faible se traduit par une baisse des recettes fiscales.
Selon la Direction de la prévision et des études économiques, les ressources globales estimées à 498,7 milliards de francs CFA se sont contractées de 8,8% à la fin du premier trimestre 2021, tandis que les dépenses publiques ont baissé de 1,5% pour se situer à 1012,6 milliards FCFA. Par conséquent, le solde budgétaire est évalué déficitaire de 513,8 milliards FCFA à fin mars 2021, contre un déficit de 480,6 milliards de francs FCFA un an auparavant.
C’est pourquoi, le Gouvernement prévoit un déficit de 5,4% du PIB en 2021, contre 5% du PIB dans le budget initial. Ceci est basé sur l'attente d'une amélioration de l'efficacité et de l'efficience des dépenses publiques et une mise en œuvre plus forte de la Stratégie de Recettes à moyen terme.
La prolongation de l'Initiative de suspension du service de la dette (ISSD) jusqu'à la fin de 2021 donnerait un peu de répit en matière de dette. Cette initiative a permis de réduire les paiements du service de la dette de 30 milliards de FCFA entre mai et décembre 2020. L’extension jusqu’à fin 2021 devrait se traduire par un allégement supplémentaire du service de la dette de 91 milliards de FCFA.
En plus de son accord technique avec le FMI, le Gouvernement a demandé un « Stand-By Credit Facility (SCF) » et un « Stand-By Arrangement (SBA) » de dix-huit mois pour un montant d'environ de 650 millions USD, soit 350 milliards FCFA. Ceci pour soutenir la réponse COVID-19 et répondre au besoin de la balance des paiements à court terme.
Le 23 avril 2021, l'État du Sénégal a levé 55 milliards FCFA d'obligations de relance sur le marché financier de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine avec des maturités de 5 ans et 10 ans pour couvrir les besoins de financement du budget de l'État dans le cadre de ses plans de relance économique. Le Secrétaire général des Nations Unies a appelé à un allégement ciblé de la dette et à des réformes de l'architecture de la dette internationale et d'autres mécanismes innovants pour créer un espace budgétaire, afin d'aider les pays vulnérables à faire face à la crise et à reconstruire des économies vertes et durables après la pandémie.
L’impact de la COVID-19 et l’Agenda 2030
Il est évident que le Sénégal n'a pas été épargné par cette crise multidimensionnelle et malgré la tendance récente à la baisse du nombre de nouveaux cas enregistrés, les coûts sociaux induits par la pandémie seraient importants. Compte tenu l'ampleur du choc, les progrès accomplis vers l'Agenda 2030 et la réalisation des ODD auraient stagné en 2020. Cela nécessite donc une action urgente et décisive pour accélérer la mise en œuvre des ODD, afin d'éviter une régression des progrès accomplis jusqu'à présent. Les efforts en cours par le Gouvernement au niveau social et économique contribueront certainement à préserver les progrès réalisés vers l'Agenda 2030.
En avril 2020, le Secrétaire général des Nations Unies soulignait que « nous ne pouvons tout simplement pas revenir là où nous étions avant le coup de COVID-19, avec des sociétés inutilement vulnérables à la crise. Nous devons construire un monde meilleur ». Dans cette optique, le système des Nations Unies (SNU) au Sénégal est engagé aux côtés du Gouvernement et des populations depuis le début de la pandémie, afin de limiter les coûts humains et socio-économiques et faire avancer l’Agenda 2030. Le graphique ci-dessous illustre l'investissement de la SNU dans les ODD au Sénégal en 2020 :
De plus, le SNU a cherché à de laisser personne pour compte, selon le principe du « Leave No One Behind », en soutenant le Gouvernement pour à mieux reconstruire (Build Back Better).
Le SNU a déployé des ressources financières et les expertises pour atténuer l'impact de la crise, en ciblant les plus vulnérables avec l'utilisation de solutions innovantes pour assurer la poursuite de l'éducation des enfants, contribuer à la sécurité alimentaire et soutenir les petites et moyennes entreprises. Son plan de travail 2021 avec le Gouvernement se concentre sur des projets de renforcement de la résilience économique, entre autres domaines, en ligne avec le PSE.